Les dividendes de l’impunité !


En une seule semaine, deux mouvements rebelles montrent officiellement leur visage. Sur la longue liste des CNDD - Palipehutu et de leurs avatars FDD et FNL, il faudra désormais ajouter le FRONABU-TABARA et les FRD. Ainsi, Bujumbura ne pourra plus se voiler la face en prétendant qu’il fait face à de simples bandits. On se rappelle que ceux qui se vautrent aujourd’hui dans les délices du pouvoir avaient été tour à tour bandits, rebelles, groupes armés et surtout terroristes-génocidaires, un qualificatif qui traduisait mieux leurs exploits sur les routes et qui leur convient toujours par ailleurs.

Pour Mirador international, la naissance de nouveaux groupes criminels n’est qu’un signe patent de l’échec des négociations d’Arusha. Comme on le sait, le processus négocié dans la ville tanzanienne a fait du Burundi un cobaye destiné à tester les modèles de sortie de crise alors en discussion dans les laboratoires spécialisés. En réalité deux théories s’affrontaient : fallait-il « favoriser la justice comme base de paix durable et de prévention des conflits » ou bien « sacrifier la justice au profit de la réconciliation et, donc, de la paix durable » ? Pour le malheur du Burundi, ce sont les tenants d’une « paix à tout prix » qui ont gagné. Pour eux, l’impunité était porteuse d’espoir ! Pourtant, la théorie en faveur de la justice comme base de paix avait été testée avec succès dans les conflits ouest-africains les plus meurtriers tels qu’en Sierra Leone ou au Liberia. Par ailleurs, on voit encore aujourd’hui les occidentaux et le TPI agiter frénétiquement l’épouvantail de condamnation pour crimes de guerre à l’encontre des dictateurs dans le cadre du déferlement du « printemps arabe ».

Malheureusement, le processus burundais fut vicié à l’avance par manque de leadership nationaliste clairvoyant, annihilé par l’omniprésence des politiciens incompétents, apeurés et littéralement dépassés par les événements. Souvenez-vous du double contexte où le gouvernement putschiste de Buyoya était lui-même associé à la mort de Ndadaye, faisant face à un FRODEBU lui-même atterré par le génocide dont ses militants venaient de consommer ! « J’ai tué, tu as tué, nous avons tué », tel fut la plate-forme des négociations, putschistes et assassins présumés de Ndadaye d’un côté et génocidaires du FRODEBU de l’autre. Dans ces conditions, la justice pesait bien moins lourd.

Le contexte régional aussi : la catastrophe rwandaise ayant abouti à un pouvoir tutsi, certains laboratoires préconisaient de faire attention au Burundi, quitte à sacrifier la justice. C’est la géopolitique. Quoi qu’il en soit, face à des négociateurs burundais – toutes ethnies confondues – dont on s’est vite rendu compte du caractère léger, mensonger et passablement cupide des délégués, la communauté internationale opta pour une solution à la fois rapide et moins coûteuse. Partagez le pouvoir et ses dividendes sur une base ethnique et vous aurez la paix ! Quant aux morts et autres violations des droits humains, mettez-les dans les pertes et profits. Ainsi, la composante criminelle, essentiellement génocidaire, était délibérément ignorée au profit des dividendes de l’impunité. Allez et prospérez !

Aujourd’hui, la preuve est faite que ce modèle a lamentablement échoué. Il n’a pas apporté la paix. Au contraire, le crime est devenu le mode de gouvernance. Des services entiers du gouvernement se spécialisent aux méthodes de la gestapo : Gatumba aujourd’hui, Muyinga hier, plan SAFISHA au quotidien ! Le modèle favorise plutôt la naissance de nouvelles rébellions attirées par les dividendes d’un pouvoir facile gratifié par un enrichissement illicite. Pendant ce temps, le pauvre paysan pour lequel ils prétendent tous se battre est rongé par les chiques et la faim. Ainsi va le Burundi, devenu le repère des criminels et des malfrats de tout acabit.

Mirador international, http://www.mirador-international.org


05/12/2011
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