Sale temps pour le Cndd-Fdd !
Le compte à rebours a-t-il déjà commencé pour le Cndd-Fdd comme parti au pouvoir ? Peut-être. En effet, depuis quelques années, ce parti n'arrive plus à organiser son congrès ordinaire dans les délais, conformément à ses statuts. Cette grande messe est reportée pour la énième fois, vers la fin de ce mois de mars 2012, alors qu'elle devrait avoir lieu au cours du mois passé ! Entretemps, plus les jours passent, plus la cohésion de ce parti n'est plus qu'un vieux souvenir. Plusieurs « clans » internes se regardent en « chiens de faïence» Cette situation ne fait que fragiliser le président de la République, aujourd'hui contesté dans son propre camp !
D'après plusieurs sources concordantes, la politique de « tolérance zéro » prônée par Pierre Nkurunziza au début de son second mandat n'a pas trouvé du soutien voulu au sein du Cndd-Fdd. Nombreux sont les cadres du parti présidentiel qui y ont vu une manière voilée du numéro un burundais, de charmer la communauté internationale, l'opposition politique et la société civile burundaises, avant de se débarrasser de certains ténors de son parti, actuellement au cour de tous les scandales politico-financiers de ces dernières années. Vite, les uns et les autres développent depuis lors, des réflexes d'autodéfense pour éviter toute arrestation et une éventuelle condamnation, susceptibles de les ouvrir les portes de la prison. Et visiblement, ces présumés hors-la-loi gagnent du poids, en instrumentalisant la Police Nationale du Burundi et les instances judiciaires, tout en isolant naturellement, le président de la République vis-à-vis de l'opinion nationale et internationale. Ils maintiennent ainsi sous anesthésie générale toutes les institutions républicaines du pays, quand il faut analyser leurs cas, eux qui sont désormais plus fort que l'Etat lui-même, à en croire certaines sources !
L'argent et le sang
En réalité, deux blocs antagonistes se forment face à cette question de « tolérance zéro. » Il y a d'une part le « clan » manipulé par le président du parti, l'Honorable Jérémie Ngendakumana et regroupant plusieurs cadres issus du Cndd-Fdd (Ministres, élus du peuple, ADG des entreprises publiques, Gouverneurs des provinces, .). Et d'autre part, l'autre « clan » de « loyalistes » toujours proches du Président Pierre Nkurunziza, sans avoir nécessairement les « mains propres » dans ces affaires de corruption et autres malversations qui font malheureusement la Une de l'actualité nationale, d'une manière quasi régulière depuis l'arrivée du Cndd-Fdd au pouvoir, en août 2005. Pour les observateurs bien avisés, l'Honorable Jérémie Ngendakumana occupe bien ce terrain miné et semble indéboulonnable dans son fauteuil, quoique les membres de l'autre « clan » voudraient le voir ailleurs, loin de leurs cercles de décision.
Sur un autre plan, à part cette « tolérance zéro » qui a du mal à engager sa vitesse de croisière, le dossier de l'assassinat de Mr Ernest Manirumva serait également sur le point d'enterrer politiquement le Cndd-Fdd. Il s'agit d'une affaire très suivie par la communauté internationale et devenue un préalable pour rouvrir les robinets de l'appui budgétaire en faveur du gouvernement burundais, à majorité Cndd-Fdd. A cet effet, le témoignage accablant de ce policier en cavale (Gilbert Havyarimana) et qui avait été embarqué dans l'opération de l'assassinat de Mr Ernest Manirumva, prouve à suffisance que ce sont les pièces maîtresses de la machine répressive du Cndd-Fdd qui y sont impliqués. Or, tout indique qu'en dépit de sa volonté de livrer à la justice ces présumés commanditaires de l'assassinat de Mr Ernest Manirumva, le Président Pierre Nkurunziza manque l'audace nécessaire pour permettre ces arrestations tant attendues pour rendre justice à cet illustre disparu et rehausser par coup, la crédibilité de son régime.
En effet, le Président Pierre Nkurunziza aujourd'hui accusé en privé par les principaux cadres du Cndd-Fdd de s'appuyer principalement sur les militants de la 25e heure, à majorité tutsi, ainsi que les anciens rebelles hutu venus d'autres mouvements que le Cndd-Fdd, n'aurait plus bonne presse chez une bonne partie des cadres influents de son parti. Même si au cours d'une réunion tenue récemment à Ngozi devant un parterre constitué par les cadres de l'Etat issus de ce parti, le Président Pierre Nkurunziza aurait déclaré que « la maison ne brûle pas » mais qu'il faudrait soutenir unanimement les prochains organes du parti qui seront bientôt mis sur pied, la méteo au sommet du parti et de l'Etat du Burundi, laisse prévoir des tempêtes contre la coalition gouvernementale qui ne profiterait d'un iota ce statu-quo. Et dont les conséquences seraient fâcheuses pour le président de la République s'il ne parvient pas à livrer à la justice ces présumés commanditaires de l'assassinat de Mr Ernest Manirumva, encore moins, à mettre en pratique sa politique de « tolérance zéro » qu'il a lui-même annoncé en grande pompe lors de son discours d'investiture pour son second mandat, en août 2010.
Une piscine vide
Quoi qu'il en soit, depuis le vendredi 27 avril 2007, date de l'emprisonnement abusif, politique et prolongé de l'Honorable El Hadj Hussein Radjabu, jusque-là idéologue, l'alpha et l'oméga du Cndd-Fdd, ce parti est entré dans le bloc des soins intensifs ! Par des bricolages, des tâtonnements et surtout grâce à la distribution de l'argent et des postes juteux, à l'impunité des crimes commis par les « gros poissons » du régime, à l'usage de la terreur et de l'intimidation, à la « nyakurisation » des grandes formations politiques de l'opposition, il était arrivé à se maintenir artificiellement sur la scène politique burundaise. Cette fois-ci, son entrée en coma politique est un secret de polichinelle, à la lecture de l'état actuel de la Nation burundaise et aux dissensions internes, frappant aujourd'hui le Cndd-Fdd, malgré cette unité de façade.
Et face à cette situation, certains ténors du Cndd-Fdd murmurent déjà que seul l'Honorable El Hadj Hussein Radjabu serait aujourd'hui en mesure de réanimer ce parti pour l'aider à terminer en beauté son mandat qui expire en 2015. Ces derniers spéculent sans beaucoup d'espoir sur un retour au bercail de tous les Radjabistes, aujourd'hui regroupés sous d'autres bannières, loin du Cndd-Fdd au pouvoir qui les a malmenés, humiliés et harcelés ! Quand ils n'étaient pas tout simplement assassinés sans autre forme de procès, par certains sbires en uniformes, de ce même pouvoir, à majorité Cndd-Fdd et incarné par le Président Pierre Nkurunziza.
Ce qui fait ainsi revenir sur le tapis, la question de l'éventuelle libération de ce leader charismatique, dans les prochains jours, si dit-on, il acceptait de coopérer désormais avec le pouvoir Nkurunziza, en jouant le rôle d'un médecin urgentiste au chevet du Cndd-Fdd. Reste à savoir si, le plus populaire et très influent prisonnier politique burundais, va-t-il accepter cet offre ou plutôt ce cadeau empoisonné? Probablement que non ! Mais ce qui est certain, le vide occasionné par son emprisonnement aura été impossible à combler par le leadership actuel du Cndd-Fdd, très fébrile, sans beaucoup d'autorité ni de crédibilité et incapable à diriger démocratiquement ce parti.
Cette crise interne au Cndd-Fdd démontre finalement qu'un parti au pouvoir ne se gère jamais comme un simple bazar de quartier. Et que des « politiciens de paroisse » ne peuvent en aucun cas se maintenir au sommet de la hiérarchie, éternellement. Même en utilisant l'argent et la violence politique comme boucliers de leur pouvoir. Seul le Tout-Puissant sait si le Cndd-Fdd va continuer sa chute comme une pierre non cuite, pour s'écraser définitivement au fond de cette piscine vide de gens et sans eau ; ou s'il sera réellement sous perfusion jusqu'en 2015, en vue d'accompagner pacifiquement le Président Pierre Nkurunziza, pour qu'il termine notamment son mandat constitutionnel, ne tenant plus aujourd'hui que sur un fil de rasoir ? Wait and see !
Arc en ciel, Le 21 mars 12
Burunditransparence.org